Journées nationales des Parents de l'APF - Le compte rendu

Etre parents d'enfants en situation de handicap et alors ?

Tel était le thème de cette rencontre que nous avons essayé, sans entrer dans le détail de vous faire vivre en direct. pendant 3 jours.

Vous trouverez, maintenant ci après un compte rendu plus détaillé des réflexions menées. Pour une meilleure commodité de lecture nous vous le présenterons en quatre parties, c'est dire demie journée par demie journée : Aujourd'hui, dimanche, mardi et jeudi.

Nous vous en souhaitons une bonne et enrichissante lecture en cliquant sur le petit "lire la suite" ci après.

 
 

Journées Nationales des Parents - APF

Lyon – Bron

28, 29, 30 novembre 2014

 

Compte rendu de l’après midi du vendredi 28 novembre

 

 

Merci à Christine et Laurent qui ont pris et fourni les notes pour la rédaction de cette présentation

1.    Présentations et introduction :

Dans la salle 170 personnes, quasiment toutes parents d’enfants en situation de handicap.

A la tribune : le coordonnateur du GNP, la représentante départementale de l’APF, et Madame la maire adjointe de Bron en charge notamment des affaires sociales, et du handicap. Après les mots de bienvenue du coordonnateur et de la représentante APF, Madame la maire adjointe évoque l’apparition d’une conscience collective qui doit continuer à s’éveiller et elle souligne l’importance du dialogue. Deux citations émaillent ces propos : « Quand les hommes ne peuvent plus changer les choses, ils changent les mots » (Jaurès) et  « La liberté est ce qui permet de faire tout ce que les lois permettent » (Montesquieu).

 

  1. Présentation du Groupe National des Parents.

Les 22 régions actuelles devraient être représentées, mais comme ce n’est pas le cas, le coordonnateur invite les parents à se motiver pour que la nouvelle réorganisation de l’APF permette d’occuper tous les sièges que prévoira l’association pour le GNP. (Groupe National des Parents)

 

  1. Thème de l’année : « Etre parents d’enfant en situation de handicap et alors ? »

 

    1. Film : Une brève projection, assortie d’une voix « off » sur fond musical lance le sujet en comparant l’arrivée d’un enfant handicap à un changement de destination brutal, alors que l’on s’apprêtait à partir en voyage. On s’était préparé pour aller en Italie et on atterrit en Hollande : Faut-il  choisir de se morfondre ou tenter d’apprécier la nouvelle destination ?

    2. Réflexions du GNP : A partir des déclarations de parents recueilles aux JNP précédentes, les membres du GNP tentent d’évaluer l’incidence de l’arrivée d’un enfant handicapé sur  la famille, la vie professionnelle, la vie de couple, la vie en société.

  • L’annonce et la vie familiale : Qu’en est-il de l’annonce du handicap ? Le diagnostic se vit comme un moment de rupture mais l’annonce se vit tout au long de la vie. Pourtant, nos enfants sont des personnes et après l’annonce du handicap, on n’a pas forcément le choix, on devient des aidants familiaux. La vie devient obligée. Mais nos interrogations sont toujours là. Quels sont ses choix de vie ? - S’il ne peut pas le dire, le choix est difficile. Tutelle, oui ou non ? Garde à la maison ou en établissement ? Et si on disparait ?

Si on le met en établissement, n’est ce pas pour protéger ses frères et sœurs ? Est-ce que la fratrie a accepté le handicap comme nous ? A-t-il sa place dans la famille ? C’est à nous parents de les accompagner pour que la cellule familiale ne s’effondre pas. On fait plus que des parents ordinaires. Droit au répit existe dans les textes mais on a du mal à le faire valoir. On fait plus que des parents ordinaires. Revendiquons-le !

  • La vie de couple : c’est avec un sketch qu’ils jouent eux-mêmes que les membres du GNP évoquent le sujet. Avoir des enfants est une grande aventure, mais bien plus encore si le handicap s’en mêle. Certes, il peut resserrer les liens affectifs mais aussi, il peut faire fuir.

  • Vie professionnelle : C’est très souvent la maman qui réduit son temps de travail. Mais sa retraite subira le même sort. La carrière est souvent mise de côté. Il faut faire évoluer le droit du travail. L’enfant a le droit qu’on s’occupe de lui. Les parents deviennent XXL. Cette performance n’est actuellement pas reconnue sur le plan professionnel sauf être accompagnant familial, mais à quel prix et à quel tarif ?

  • Vie en société : La mère perd souvent son identité sociale : Finies les sorties, sans même parler des loisirs. Si elle n’a pas de relais, elle culpabilise de prendre du temps pour elle. Il faut faire comprendre que les parents demandent à être des parents ordinaires même s’ils ont des enfants extraordinaires. Evitons l’enfermement.

 

    1. Les effets du handicap sur la sphère familiale par Michel Billé, sociologue.

Nous connaissons parfois de véritables tremblements de terre et leurs effets ne finissent pas de nous ébranler. La situation devient comparable à une « pierre que l’on jette dans l’eau pure d’un ruisseau… des milliers de ronds dans l’eau » (Ndrl Michel Legrand, les Moulins de mon cœur). Cette pierre ne trouble la surface que parce que cette qu’elle bouscule les équilibres fragiles sur lesquels sont construites nos existences. C’est ainsi que M. Billé lance son exposé.

Il s’interroge ensuite sur : Qu’est-ce qui convient de dire pour annoncer le handicap ? Comment le dire, sachant que la vérité est souvent dure à habiter. Elle cause un traumatisme dû à la confrontation à la réalité.

Avec une citation d’Albert Camus : « mal nommer les choses, c’est ajouter aux malheurs du monde » nous comprenons que l’annonce est toujours difficile, d’ailleurs : Faut-il annoncer ou énoncer le handicap ? De toute façon, donner un diagnostic, c’est engager l’avenir.

M.Billé affirme que nous avons tous des capacités de résilience différentes. Elles dépendent de notre construction identitaire et de notre estime de soi.

Selon Pierre Sansot (Ndlr : philosophe, sociologue et écrivain) : « mon identité est l’image que j’ai de moi, forgée dans le rapport aux autres parce que j’ai par la suite à répondre à leur attente ». Cette estime nous permettrait d’arrêter de confondre moi et l’image que j’ai de moi. Pourtant, Il y a souvent un écart, et plus il est grand, plus il y a une souffrance. Par exemple : Je suis menuisier. Si demain je n’ai plus d’emploi, je suis quoi ?

La question identitaire commence avec qui suis-je ? Mais il faut aller plus loin : « Toi qui me regarde, qui dis-tu que je suis ? Et si tu n’attends rien de moi, circule, dans le mal entendu, nous ne ferons que nous rencontrer » dit M. Billé. Qu’attendons-nous de l’autre ? Les parents vivent la situation de handicap avec leurs enfants. Les « psy » parleront de blessure narcissique. Blessure, oui, mais narcissique ? La construction identitaire se joue dans la circulation d’images. Parce que l’autre a une représentation de moi et une attente à mon égard.

Donald Winnicoot,(Ndlr :pédiatre, psychiatre et psychanalyste anglais) parle d’estime suffisante continue de soi. Il faut s’estimer suffisamment pour rester debout pour pouvoir rester en communication avec les autres, sinon, la relation aux autres ne peut pas se tisser.

Le handicap « me » touche  moi par rapport aux autres. Comment l’autre va « me » percevoir, moi qui suis devenu porteur d’un handicap, que ce soit chez moi ou chez mon enfant.

Certains couples en sortiront renforcés, d’autres ne résisteront pas. Le handicap bouleverse la donne. On doit organiser le temps de chacun en fonction de la demande particulière. Que reste-t-il pour soi ? Pour le temps à deux ? Comment prendrons-nous soin l’un de l’autre ?

L’amour conjugal a parfois besoin de temps et de travail si on ne veut pas qu'il se délite

Culpabilité, faute : lequel des deux a introduit le handicap ? La génétique avec une précision de scalpel peut donner une vérité d’une incroyable violence dans les univers familiaux non nécessairement préparés.

Quelquefois, le père ne trouve plus sa place et il s’éloigne. Les enfants les plus âgés vont découvrir un champ sémantique qu'ils ne connaissaient pas. Les autres enfants doivent apprendre à en parler, avec les copains, les cousins, la famille,… l’onde de choc bouleverse les enfants, les grands-parents : les uns accourent à l’aide et d’autres se mettront à distance par peur. Une peur qui peut être prise pour du désamour.

Onde choc sur les amis aussi. Combien avons-nous d’amis ? Is sont pris dans une sidération qui les empêche de s’inscrire dans la réalité et qui gèle les capacités de réaction. Certains pourtant ont une implication telle qu’elle leur permet d'agir de façon très précoce.

Certains seront précieux. Les vrais amis connaissent le même phénomène mais à un degré moindre. Ils pourront par exemple,  réintroduire de l’humour dans une vie qui en est dépourvue. Les vrais amis seront ceux qui vont vous faire rire. Ils n’ont rien à voir avec ceux que l’on rencontre sur les réseaux sociaux.

Michel Billé confirme que la sphère professionnelle n’est pas épargnée : « Soit vous ne dites rien et les autres ne comprennent rien » : pourquoi désintérêt ou pourquoi sur intérêt.

Ou alors on en parle et la moindre mauvaise humeur, le moindre problème risque d'être placé sous la raison du handicap et l’onde de choc se propage, les autres expliquent tout avec le handicap.

Et il enchaine en disant que : « Le niveau de vie de la famille se trouve aussi impacté ». On n’imagine pas le nombre de renoncement que les jeunes parents doivent vivre dans l’enchainement : d’annoncer, d’énoncer puis de renoncer.

Renoncer à quoi ? A l’enfant dont on rêvait. Amis, carrière, l’affaire d’une vie, on renonce à une sorte de vie idéalisée. Le plus difficile est de renoncer à l’image de soi. L’image que l’enfant nous renvoie intègre la dimension du handicap. C’est tout l’univers familial qui est porteur du handicap.

A quoi tient qu’on est capable de passer du pire au meilleur ? – A l’accompagnement de la famille, des amis, des professionnels. C’est ce qui permet de reconstruire l’image de soi. Jacques Prévert a écrit : « c’est dans le miroir des autres que l’on se reconnait ».

 

Les conséquences de choix d'arrêter le travail sont financières, à court ou long terme. Report de la maison, ou de la voiture, de quelle voiture d'ailleurs, quelle taille aura-t-elle pour transporter le fauteuil ?

Renoncer à l'enfant dont on rêvait. L'affaire d'une vie, renoncer à une sorte de vie idéalisée et qu'il nous faudra vivre dans une réalité totalement différente.

Renoncer à l'image que l'on avait de soi-même.

Un enfant est porteur d'un handicap. Pourtant et on ne dit jamais c'est tout un univers familial qui est porteur de ce handicap.

Il ne faut quand même pas oublier ou sous estimer l’accompagnement par des « équipes d'orfèvres » (sic) qui auront un regard bienveillant sur ces personnes.

Heureusement tente de conclut Michel Billé : Tout n'est pas drame. Même quand tout est grave, tout n'est pas forcément dramatique. Il faut engager l'avenir avec ce qui se présente à nous.

Et pour terminer il nous propose non sans humour,  une histoire vraie : Une jeune femme, 28 ans, apprend à l’échographie pour son premier enfant que le radiologue croit déceler une fente labiale. La situation est confirmée par une spécialiste qui y voit même en plus fente gingivale et palatine. La maman s’effondre dans les bras de son mari qui lui dit avec son accent anglais : « effectivement pour jouer de la trompette, c’est pas terrible mais pour jouer du piano, il n’y a pas de problème ».

Le regard vers l’avenir est un élément constitutif. Gardons la possibilité de regarder l'avenir et de lui donner du sens malgré tout. N’oublions jamais le piano.

Avant d’en terminer M. Billé  s’interroge sur la souffrance des professionnels et précise qu’il vaut mieux parler de la bonne proximité plutôt que de la bonne distance. Quand le professionnel considère le parent comme un égal, cela change. Chacun est complémentaire.

C’est à nous citoyens à faire valoir notre citoyen. Nous avons un discours politique à faire valoir.

 

Question de la salle : Le plus dur n'est-il pas de pénétrer dans la sphère familiale ?

R : Il n'est pas facile pour y rentrer de trouver la réponse juste : le sourire, la parole.

 

Question de la salle : Un regard positif oui, mais on ne le trouve souvent pas dans la société française.

R : Dans nos mentalités françaises tout est à revoir et tout à construire. Il serait bien qu'on les définisse autrement. Trilogue au lieu de dialogue, inclure les enfants dans la discussion. « Ce que vous faites pour moi, si vous le faites sans moi alors vous le faites contre moi » (N Mandela ou Gandhi) Ndrl : il s’agit de Gandhi

 

Question de la salle : Existe-t-il un père au monde qui porte un œil objectif sur ses enfants ?

R : Les professionnels ont été formatés contre le fait de s'impliquer affectivement. Si vous ne m'aimez pas, fichez-moi la paix. Il faut enseigner au personnel médical à ne pas laisser au vestiaire ses sentiments. "la bonne distance" doit être remplacée par La bonne  proximité. Quand je suis malade, je veux bien être aimé par ceux  qui s'occupent de moi. Depuis 25 ans une association a été créée en Belgique entre professionnels et parents. Nous sommes complémentaires par rapport aux professionnels et si on arrive à créer de tels regroupements, les choses changent et vite.

La question que nous avons à adresser une question à la société, c'est de faire valoir de la citoyenneté des parents d'enfants handicapés.

 

    1. Ateliers : Sous l’appellation Kaffeecklatsch I  (se retrouver autour d’un café pour papoter), 3 sujets de réflexion et de discussion ont été proposés aux parents présents par groupe d’environ 15 personnes.

  • Quel a été l’impact de l’annonce du handicap sur votre vie de famille?

  • Le handicap a t-il impacté votre projet professionnel, comment?

  • Quelle vie de couple et quelle vie affective lorsque vous avez un enfant handicapé? –cet atelier était accompagné par François Crochon, sexologue clinicien.

 

  1. La place des familles dans l’association

Avec la participation de Prosper Teboul, directeur général de l’APF et Claude Volkmar, directeur général du CREAI Rhône-Alpes.

Depuis la demande des parents aux JNP 2011, pour une plus grande écoute des familles dans les établissements et service, l’APF en est venue à s’interroger plus largement sur la place des familles dans l’association. Des groupes de travail ont été mis en place, leurs conclusions et propositions devraient être très prochainement connues.

 

 

Fin de la première ½ journée. A très bientôt pour la suite.

Commentaires

  • Bonjour,
    j'ai apprécié l'accueil particulièrement soigné et chaleureux
    toutes les personnes qui se sont occupés de notre séjour méritent
    notre admiration, part leur implication leur disponibilité et leur gentillesse...
    BRAVO!!!!!!!!
    M. BILLE M. Sociologue a une étude intéressante dommage que les mots employés sorte de notre langage courant imprégnant une certaine nonchalance a l'écoute de son récit.
    La présentation d Mme l'ajointe au Maire m'a touché, ça fait plaisir de voir des élus qui savent s'impliquer pour faire évoluer les mentalités.
    Enfin, avec ma femme, nous avons eut le plaisir de retrouver tout les parents qui nous ont fait vibré par leurs témoignages et leurs soutiens les années précédentes.
    Bien à vous.
    Famille ALLEGRE

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